Le cheval voit son métabolisme et son système digestif évoluer avec l’âge, tout comme chez nous les humains. Avec l’allongement de l’espérance de vie équine et l’amélioration des pratiques de soins, de plus en plus de chevaux vivent au-delà de 25 voir 30 ans. Ces vieux chevaux, souvent appelés « chevaux seniors », nécessitent une attention particulière, notamment en ce qui concerne leur alimentation.
Les besoins nutritionnels d’un cheval âgé diffèrent sensiblement de ceux d’un animal plus jeune ou de compétition. Il est donc vital d’adapter leur ration alimentaire afin de maintenir leur état corporel, leur masse musculaire et leur forme physique, tout en luttant contre les effets du vieillissement. Ce article propose un éclairage détaillé sur les particularités physiologiques du vieux cheval et donne des conseils pratiques pour l’aider à bien vieillir.
Particularités du cheval âgé d'un point de vu physiologique
Le microbiote digestif : une entité qui vieillit
La flore intestinale, aussi appelée microbiote digestif, joue un rôle central dans la digestion, l’absorption des nutriments et le bon fonctionnement du système immunitaire. Chez le cheval âgé, après 25 ans, on observe une modification progressive de cette flore, avec une perte de la diversité bactérienne et une efficacité digestive réduite.
Cette baisse de performance du microbiote peut conduire à une diminution de l’assimilation des fibres (cellulose…), des protéines et des vitamines, malgré une ration en apparence suffisante.
De plus, le transit digestif peut devenir plus lent, augmentant le risque de colique, un trouble digestif fréquent chez les chevaux âgés. Il devient alors essentiel d’adapter le régime alimentaire en fonction de la capacité digestive de l’animal.
La dentition : particularité du cheval âgé
La dentition est un autre point crucial. À mesure que le cheval vieillit, ses dents s’usent, allant jusqu’à tomber, entraînant une diminution de la capacité de mastication.
Certains vieux chevaux présentent des troubles dentaires majeurs : dents « flottantes », ulcérations buccales ou encore perte de dents. Cela compromet fortement la mastication et donc la digestion, car les fibres longues, comme le foin, ne sont plus bien broyées et ne sont ensuite plus accessible correctement au microbiote digestif une fois arrivé dans le gros intestin.
Cette situation affecte directement l’ingestion et le comportement alimentaire. Le cheval peut mettre plus de temps à manger, laisser des parties non mâchées, « faire magasin » : c’est à dire accumuler de la nourriture entre ses molaires et sa joue, maigrir ou développer une forme d’anorexie. Une surveillance dentaire régulière par un vétérinaire est donc indispensable afin de prévenir l’apparition de ce genre de problème.
Les besoins des chevaux âgés comparés à ceux des chevaux d’âge moyen
Le vieillissement entraîne des modifications métaboliques : diminution du métabolisme de base, baisse de l’efficacité du système immunitaire et parfois apparition de pathologies chroniques, comme le syndrome de Cushing. Tous ces facteurs impliquent une réévaluation des apports nutritionnels.
Ainsi, un cheval senior nécessite souvent :
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Un apport protéique de bonne qualité, facilement assimilable, pour entretenir la masse musculaire ;
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Un niveau énergétique adapté, notamment s’il perd de l’état ou s’il vit au pré en hiver ;
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Des vitamines, minéraux et antioxydants pour soutenir l’immunité ;
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Un fourrage digestible et facile à ingérer malgré une dentition réduite.
Il faut également surveiller le poids du cheval : la perte de condition physique est un signe d’alerte d’un déséquilibre nutritionnel ou d’un problème de santé.
Comment nourrir un cheval âgé ?
Les aliments possibles
L’alimentation du cheval âgé doit être riche, facilement digestible et adaptée à ses capacités physiques.
En cas de problèmes dentaires, il faudra opter pour des aliments faciles à mastiquer, voire « trempés » ou « mouillés ».
En effet, en vieillissant, le cheval peut perdre sa capacité de mastication du foin et ne plus s’apporter assez de fibres digestibles.
Voici les principaux types d’aliments utilisables :

Bouchons de foin (ou cubes de foin) : ils remplacent le foin long, difficile à mastiquer. À tremper dans l’eau, ils offrent un fourrage humide, riche en fibres courtes plus facilement digestibles ;
Pulpe de betterave : énergétique, sans sucre ajouté, elle est une excellente source de fibres fermentescibles. Elle doit être trempée longuement pour éviter les risques de colique. Utilisez 5 volumes d’eau, pour 1 volume de pulpe. ;
Luzerne (en bouchons ou granulés) : protéine de qualité, très utile pour maintenir la masse musculaire. Attention à l’excès de calcium, à surveiller en fonction de l’état rénal. Dans l’idéal, la ration de luzerne devra être mise en soupe ;
Aliments spécialisés pour chevaux âgés : on trouve des granulés ou floconnés complets, conçus pour les chevaux seniors. Leur formulation nutritionnelle tient compte des besoins spécifiques et de la digestibilité réduite. Ils sont souvent humectés ou proposés en mash. Il faudra cependant veiller à ne pas oublier l’apport de fibres, particulièrement si votre vieux cheval ne réussit plus à mastiquer correctement le foin ;
Graines oléagineuses : le lin ou le tournesol, très riches en acides gras, sont intéressants pour l’énergie, la brillance du poil et la fonction immunitaire ;
Plantes digestives (fenugrec, fenouil, anis, camomille…) et compléments pour la digestion : elles peuvent faciliter la digestion et stimuler l’appétit, utiles pour les chevaux maigres ou immunodéprimés ;
Compléments alimentaires pour les articulations : des compléments ou plantes destinés au confort articulaire peuvent également être rajoutés afin de facilité le confort locomoteur des chevaux vieillissants.
L’huile : une solution pour augmenter la densité énergétique de la ration
L’huile végétale (colza, maïs, lin) est un complément énergétique utile pour le cheval âgé. Riche en matières grasses, elle permet d’augmenter l’apport calorique de la ration sans augmenter le volume du repas. Cela est crucial quand le cheval montre une diminution de l’appétit ou une difficulté d’ingestion.
Des quantités allant de 25 à 150mL par jour, introduites progressivement, peuvent faire une différence significative dans l’entretien de l’état corporel. L’huile est également bénéfique pour les chevaux atteints de Cushing, en limitant les apports de sucre et d’amidon issus des céréales, limitant ainsi les désordres métaboliques.

Nourrir un cheval âgé est un acte de soin. C’est veiller à son confort digestif, à sa santé générale et à son état corporel, tout en respectant son rythme et ses capacités de digestion. Grâce à une alimentation adaptée, un suivi vétérinaire régulier et quelques astuces simples comme tremper les aliments ou fractionner les repas le plus possible, il est possible d’améliorer la qualité de vie des vieux chevaux.
Chaque individu étant unique, une évaluation personnalisée du régime alimentaire est souvent nécessaire. L’état dentaire, le niveau d’activité, les maladies associées (comme la maladie de Cushing) ou encore les troubles comportementaux doivent guider la composition de la ration. Des outils comme le suivi du poids, l’observation des crottins ou le calcul de ration sont de précieux indicateurs.
En résumé, bien nourrir un cheval senior, c’est respecter une équation délicate entre ingestion, digestion, besoins spécifiques et capacité d’assimilation. C’est un enjeu majeur pour l’entretien au quotidien qui mérite une attention particulière jusqu’à la fin de sa vie.